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​Précisions de la CJUE sur la protection contre l'extradition d'un citoyen de l'Union européenne

Pénal - Procédure pénale
09/09/2016
Un État membre n'est pas tenu d'accorder à tout citoyen de l'Union, ayant circulé sur son territoire, la même protection contre l'extradition que celle accordée à ses propres ressortissants. Toutefois, avant de l'extrader, l'État membre concerné doit privilégier l'échange d'informations avec l'État membre d'origine et lui permettre de demander la remise du citoyen aux fins de poursuites. Dans la mesure où l'autorité compétente de l'État membre requis dispose d'éléments attestant d'un risque réel de traitement inhumain ou dégradant des personnes dans l'État tiers concerné, elle est tenue d'apprécier l'existence de ce risque lorsqu'elle examine la demande d'extradition. Telles sont les précisions apportées par un arrêt de la CJUE, rendu le 6 septembre 2016 (cf. également CJUE, 5 avr. 2016, aff. C-404/15, Pál Aranyosi et Robert Căldăraru).

En l'espèce, un ressortissant estonien a fait l'objet d'un avis de recherche publié sur le site internet d'Interpol. Il a été arrêté le 30 septembre 2014 dans la ville de Bauska (Lettonie), puis placé en détention provisoire. Le 21 octobre 2014, les autorités lettones ont été saisies d'une demande d'extradition émanant de la Russie. Cette demande indiquait que des poursuites pénales étaient diligentées contre M. P. et que celui-ci devait être placé en détention pour tentative de trafic, en bande organisée, d'une grande quantité de stupéfiants. Selon la législation russe, cette infraction est passible de 8 à 20 ans de prison. Le Parquet général de Lettonie a autorisé l'extradition de M. P. vers la Russie. Toutefois, ce dernier a demandé l'annulation de cette décision au motif que, en vertu de l'accord relatif à l'assistance judiciaire et aux relations judiciaires conclu entre les pays baltes, il bénéficiait en Lettonie des mêmes droits qu'un ressortissant letton et que, compte tenu du fait que le droit letton interdit en principe l'extradition des ressortissants nationaux et que cet État membre, conformément à un traité conclu avec la Russie, n'extrade pas vers ce pays ses propres ressortissants, la Lettonie était tenue de le protéger contre une extradition non fondée.

La cour suprême de Lettonie a alors demandé à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) si, aux fins de l'application d'un accord d'extradition conclu entre un État membre et un État tiers, les ressortissants d'un autre État membre doivent bénéficier, au regard du principe de non-discrimination fondée sur la nationalité et de la liberté de circulation et de séjour des citoyens de l'Union, de la règle qui interdit l'extradition des ressortissants nationaux. Elle a également posé la question de savoir si l'État membre requis doit vérifier (et, le cas échéant, selon quels critères) que l'extradition ne portera pas atteinte aux droits protégés par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. La CJUE donne la réponse ci-dessus mentionnée.
Source : Actualités du droit